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Lumière sur des super-héros

Sciences participatives

Comment rendre un « truc » soit disant gluant, allongé de quelques centimètres, se tortillant dans tous les sens et de surcroît rose-marronnasse, extrêmement sympathique ?

Avec des yeux et un sourire, ça donne ça :

Mais en vrai, le ver de terre, c'est un super héros !

Pourquoi ?

Alors que certaines larves et insectes dévorent les plantes et se voient affublés du nom de « ravageurs », parce qu'ils passent leur temps à manger ce que l'on ne veut pas qu’ils mangent. Voilà un être original qui avale jour après jour des litres de terre et qui modifie son environnement au profit de nombreux organismes et que l'on appelle ingénieur des écosystèmes, le summum du compliment !

Son super pouvoir ?

La capacité d'avaler plusieurs fois par jour son poids en terre et à la libérer sous forme de crottes dans ses galeries souterraines et à la surface. Pour une fois que la fabrique à « merde » est plébiscitée ! D'ailleurs, en passant, je vous recommande Safari dans la bouse de Marc Giraud et Roland Garrigue aux Editions Delachaux et Niestlé. Très formateur.

Une publication qui fait le point

Mais je m'égare. Nous sommes loin du très sérieux article A review of earthworm impact on soil function and ecosystem services publié en 2013 dans l'European Journal of Soil Science. Dans cet article, tous les bénéfices des lombrics sont passés en revue. Leur masse (on parle aussi de biomasse) peut atteindre 4 tonnes à l'hectare. Cela représente environ 100 à 500 individus par m² (ces chiffres, je les ai lus dans « Gestion durable des sols » aux Editions Quae).

Chacun sa place !

Mais attention, il ne faut pas tout mélanger. En France, il existe environ une centaine d’espèces différentes de vers de terre, réparties en 3 groupes selon leur rôle et leur fonction dans l’écosystème. Les plus faciles à observer sont ceux que l'on appelle les anéciques et qui sont les plus gros et qui remontent en surface. Ils représentent 20 à 30 % des vers de terre trouvés dans un sol cultivé en France (c'est 50% du territoire français quand même). Le chiffre m'a été donné par Kevin Hoeffner, qui s'occupe avec Daniel Cluzeau de l'Observatoire participatif des Vers de Terre.

Les nomades et les casaniers

Les plus abondants (70 % dans un sol cultivé) sont les spécialistes des galeries souterraines horizontales, les endogés. Leurs « trucs » c'est de créer des galeries temporaires, non entretenues. Au contraire, les anéciques sont « très à cheval » sur leurs galeries verticales où ils effectuent des allers et retours avec la surface. Et la 3ème catégorie, ce sont les épigés qui représentent 5 à 10% des vers de terre en milieu cultivé. Eux vivent en surface et n’ont pas la musculature pour évoluer dans le sol. Ils vivent et dégradent les amas de matière organique ; l’espèce la plus connue est le ver de fumier.

Cette illustration est à titre indicatrice. Rose-Line Preudhomme, notre spécialiste de l'Observatoire Agricole de la Biodiversité m'a indiqué que les endogés sont toujours dans le sol et ne remontent jamais ou très rarement à la surface. Les galeries superficielles remontant vers la surface n'existent donc que très rarement. © bioactualites.ch

Quand ils créent « de grandes choses »

Nos ingénieurs pourraient symboliser le slogan « du local au global » parce que chacune de leurs petites actions créent de « grandes choses ». En Europe, sous un climat tempéré, les anéciques transportent ainsi vers la surface, 40 tonnes de terre par hectare. Les chercheurs écrivent qu'en un siècle, ils peuvent potentiellement renouveler 40 cm d'un sol. Sans compter leur capacité à ingérer les feuilles, les brindilles qui traînent en surface.... En certains lieux, ils enfouissent 90 à 100 % des matériaux de la litière.

Ils mélangent, aèrent et créent chaque jour un sol nouveau, utile aux autres organismes.

Ces supers intestins et producteurs de déjections à haute valeur ajoutée sont donc les premiers producteurs de sol. Je n'ai pas trouvé leur indice au CAC 40 mais si l'on ajoute à leur panel leur facilitation du transport en eau grâce à leurs galeries, ainsi que leur production en azote directement assimilable par les plantes (toujours dans leurs crottes !), leur portefeuille pourrait se chiffrer à plusieurs milliards de dollars.

Mais les vers de terre sont de humbles héros de tous les jours... qui préfèrent l’ombre.

Merci les gars !

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Lisa Garnier, le lundi 02 mars 2015

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