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Éoliennes et chauves-souris peuvent-elles cohabiter ?

Sciences participatives

Traversant les plaines de la Beauce pour me rendre à Rennes et discuter vers de terre avec nos partenaires de l'Observatoire Participatif des Vers de Terre (OPVT), j'observais les immenses pales des éoliennes tournoyer lentement dans l'air frais hivernal. Lentement ? Pas vraiment… Si elles nous semblent évoluer au ralenti, la réalité est toute autre !

La vitesse c'est subjectif

Christian Kerbiriou, notre spécialiste chauves-souris avec Jean-François Julien m'a bien vite détrompée en m’expliquant qu'au bout des pales, la vitesse peut atteindre 270 km/h ! Une vitesse non négligeable pouvant occasionner chez les chauves-souris des traumatismes importants. Alors qu'en est-il exactement du rôle des éoliennes dans la mort des reines de la nuit ?

Fowler Ridge wind farm : une forêt de pales tournoyantes

L'histoire de ce post commence en octobre 2014, avec la parution d'un article scientifique (ici en anglais) sur le comportement des chauves-souris dans un champ de 355 éoliennes plantées dans un décor de grandes cultures de l'Indiana aux États-Unis.

Des caméras de surveillance pour chauves-souris

Alors que plusieurs dizaines, voire des centaines de milliers de chauves-souris meurent chaque année Outre-Atlantique dans les parcs éoliens, l'équipe de chercheurs américaine s'est demandée si les « bêtes » ont un comportement particulier autour des pales qui les mettrait en danger. Ils ont donc implanté des caméras à infrarouges et enregistré plus de 1300 heures de vidéos, qu'ils ont ensuite patiemment décortiquées.

Le champ d'éolienne ne fonctionne pas comme un aspirateur à chauves-souris

La bonne nouvelle, c'est que les bêtes savent éviter les champs d'éoliennes, surtout lorsque le vent est fort ! Et celles qui s'y risquent en période peu venteuse, et souvent aux alentours de la pleine lune, semblent être des espèces de chauves-souris forestières migratrices.

Une attirance inexpliquée

Cependant, d'après les chercheurs, le long mât des éoliennes les attirerait comme peuvent le faire les troncs des arbres. Cela reste néanmoins une supposition. En réalité, ils ne comprennent pas pourquoi les chauves-souris peuvent être attirées par ces moulins à vent technologiques. Des canadiens supposent que ce serait lié à des comportements sociaux spécifiques ayant lieu lors de la migration d'automne : les chauves-souris seraient tout simplement attirées par tout ce « qui est haut » : pylônes, antennes, éoliennes....

Eviter les impacts

chauves-souris de l'Indiana

Curieuse, je suis allée sur le site de l'US Fish and Wildlife service de l'Indiana où l'on a pris très au sérieux la mort de chauves-souris de l'Indiana, l'espèce protégée de l'Etat, dans la ferme d'éoliennes de Fowler Ridge. Celle-ci a dû rédiger un plan de conservation, selon lequel il est notamment prévu d'arrêter les pales en cas de faible vent (pour les plus intéressés, le dossier ici). En France, l'entreprise Biotope a imaginé une méthode similaire, nommée Chirotech.

 

 

Image ci-contre: Chauves souris de l'Indiana (Myotis soladis) passant l'hiver bien au chaud dans les grottes du Midwest © Andrew King (US Fish & Wildlife service)

 

 

Et chez nous ?

Mais revenons à la Beauce, à ces grandes cultures où pipistrelles, noctules et sérotines viennent chasser. Lara Millon, Jean-Francois, Christian et Romain Julliard du laboratoire CESCO ont quant à eux comparé l'activité des chauves-souris sous des éoliennes de Champagne-Ardenne (au nombre de 30, près de 12 fois moins qu'aux « States ») et à côté des éoliennes dans un paysage presque identique. Dans leur article scientifique (ici) paru à l'automne, ils montrent que les chauves-souris sont moins nombreuses sous les éoliennes que dans le champ agricole d'à côté.

La transition énergétique ne doit pas oublier la vie qui nous entoure

Ce qui fait dire aux chercheurs, que oui, les chauves-souris semblent plus ou moins éviter les éoliennes, mais que ces immenses pales sur pied réduisent également leurs terrains de chasse et ce, même dans un régime de grandes cultures où la biodiversité est, on le sait, plutôt pauvre.

On n'a pas fini d'observer les éoliennes.

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Lisa Garnier, le lundi 09 février 2015

Pour s’abonner au blog, cliquer sur lgarnier@mnhn.fr

→ Vous voulez vous investir dans le suivi des chauves-souris en France ? Vous pouvez participer à l'observatoire Vigie-Chiro. Il y a la version pour les naturalistes ici et la version pour les écoles ici.

 "c'est incroyable! je n'ai pas vu un seul moustique de la soirée"

"C'est surprenant. Je n'ai pas aperçu un moustique de la soirée."

© Bruce Plante (Defenders of Wildlife blog)

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