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Laissez vieillir les arbres !

Sciences participatives

La vie est ainsi faite dans une forêt : plus elle comporte de cavités, de champignons, de fissures souvent perchés en haut des arbres, plus les populations d’oiseaux et de chauve-souris qu’elle héberge sont importantes. Ce résultat nous le devons à un jeune docteur en écologie (il a brillamment soutenu sa thèse le lundi 23 septembre 2013 au Muséum national d'Histoire naturelle) Baptiste Regnery. Ce jeune homme a travaillé sur un sujet complexe : les mesures de compensation de la biodiversité, que nous ne développerons pas ici mais qui consiste à évaluer les pertes et les gains de la vie animale et végétale lorsque nous, humains, construisons routes, parkings et lotissements.

Des trous, des fissures et des craquelures

Lors de ses travaux, Baptiste s'est intéressé à la forêt méditerranéenne, « construite » de chênes pubescents et de chênes verts. A partir d’un inventaire des micro-habitats (qui est le nom donné aux cavités, fissure, etc. situés sur les arbres) mené par l'Office National des Forêts (ONF) sur 1631 ha (soit plus de 2200 terrains de football), Baptiste a pu bénéficier d’un jeu de données intégrant tous les micro-habitats d’arbre de tailles diverses existants au sein des arbres : du trou réalisé par un pic, aux fissures et galeries de plus d'un centimètre de diamètre forgé par les larves de capricornes. Champignons de plus de cinq centimètres, bois morts au niveau de la canopée et présence de lierre (un quart de la hauteur totale de l'arbre) ont aussi été comptabilisés. Tout cela dans des forêts aux histoires contrastées de celles dont les dernières coupe remontent à moins de 30 ans jusqu’à celles qui n’ont pas subie de coupes depuis près d’un siècle.

Pic épeiche, Dendrocopos major ©Biosphoto/Patrice Correia

Chants et écholocation

Par ailleurs, Baptiste a arpenté les 1631 ha afin de savoir quels oiseaux nichent en ces lieux et quelles chauves-souris y trouvent leur logis (en suivant le protocole de Suivi Temporel des Oiseaux Communs (STOC) et Vigie-Chiro). L'idée étant, bien entendu, de savoir si plus le nombre et la diversité de micro-habitats augmente dans une forêt, plus ils permettent à ces oiseaux et mammifères volants de s'installer.

Que vivent les chênes verts !

Bingo ! Baptiste montre que c'est l'ensemble des communautés d'oiseaux communs et de chauves-souris, qui profite de l'augmentation du nombre de micro-habitats situés dans les arbres. Au niveau des espèces, les mésanges bleues et les sitelles torchepot sont par exemple, plus nombreuses. Tout comme la pipistrelle commune et la pipistrelle de Nathusius, pour les chauves-souris. Baptiste montre aussi que le nombre de micro-habitats est positivement lié à l'âge des forêts depuis la dernière coupe et que les chênes verts se révèlent particulièrement « constructeurs » de micro-habitats. Plus ils vieillissent, plus ils deviennent accueillants.

Un nouvel indicateur pour les forestiers ?

Des résultats qui confortent Baptiste dans l'idée que les forestiers peuvent utiliser le nombre et la diversité de micro-habitats des forêts pour en évaluer la biodiversité. Pas besoin d'être expert en ornithologie, ni en chiroptères. Trois minutes suffisent pour étudier un arbre et les relevés n'ont pas besoin d'être réalisés chaque année. La technique compléterait les relevés d'espèces.

En attendant, qui du chêne et d'un humain, né le même jour, saura le plus favoriser les autres espèces animales ?

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Lisa Garnier, le lundi 30 septembre 2013

Pour s’abonner au blog, cliquer sur lgarnier@mnhn.fr

 Pour en savoir plus :

je vous invite à lire la thèse en français de Baptiste ainsi que les deux articles rédigés en anglais sur le sujet écrits en collaboration avec Denis Couvet, Loren Kubarek, Jean-François Julien, Christian Kerbiriou du Muséum national d'Histoire naturelle et Yoan Paillet de l'Irstea pour plus de détails.

Which factors influence the occurrence and density of tree microhabitts in Mediterranean oak forests? 2013. Regnery et al. Forest Ecology and Management. Tree microhabitats as indicators of bird and bat communities in Mediterranean forests. 2013. Regnery et al. Ecological Indicators : 221-230.

 

Liens :

Vigie-ChiroSuivi Temporel des Oiseaux Communs (STOC) Office National des Forêts (ONF)Institut national de recherche en sciences et technologies pour l'environnement et l'agriculture (Irstea) MNHN

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